Sadako, vingt ans après (2024)

Une journaliste, Reiko Asakawa, enquête sur ce qui semble n’être a priori qu’une légende urbaine: l’existence d’une cassette vidéo qui, dès lors que l’on regarde son contenu, fait mourir son spectateur une semaine plus tard d’une crise cardiaque, avec sur le visage tous les indices d’une indicible terreur. Son enquête lui fait suivre la piste d’une bande de quatre jeunes qui lors d’une escapade durant un week-end aurait visionné la cassette qui aurait donc causé leur mort sept jours après. Alors qu’elle se trouve dans le chalet qu’ils ont occupé, elle tombe sur la fameuse VHS…

Dix-huit ans, déjà, presque vingt ans que le film emblématique du renouveau de la J-horror est sorti sur nos écrans. A l’époque, le voir avait été tout de même quelque chose. Si on commençait à être habitué de voir des films de Kitano ou d’autres auteurs tels que Aoyama ou Kawase, il était plus rare de tomber sur des films fantastiques japonais. C’est alors que déboule sur nos écrans ce Ring. Rien que ce mot déjà interpellait. Quoi Ring? de boxe? un anneau? Mais où qu’il est l’anneau sur l’affiche? Car sur l’affiche, point d’anneau mais juste un visage terrifié et déformé, avec il est vrai une multitudes de cercles superposés. En y scrutant les noms présents, on distingue ce parfait inconnu, Hideo Nakata mais aussi celui-ci : Kenji Kawai, à l’époque le compositeur bien connu de la B.O. de Ghost in the Shell. De quoi tout de même donner sa chance à ce film.

La suite, on la connait. Plein de spectateurs la lui ont donnée, sa chance. Le bouche à oreille a tellement bien fonctionné que Ring se taille une jolie carrière internationale et défonce tout au box-office japonais (1 milliard de recettes, record pour un film d’horreur). Surtout, il se taille le luxe d’avoir un personnage iconique de la pop culture en la personne de Sadako, le fantôme du film à l’apparence d’une jeune fille maigre et aux longs cheveux lui cachant le visage. On ne comptera plus désormais les clins d’œil dans les mangas, les dramas ou les films à ce personnage que Nakata réutilisera d’ailleurs dans une suite bien moins intéressante, Ring 2.

Aujourd’hui, qu’en est-il ? Ring vaut-il la revoyure? Et vaut-il simplement d’être vu pour celui qui serait passé à côté? L’ayant vu tout de même un petit paquet de fois, notamment lorsqu’il est ressorti chez nous en DVD, je dois dire que l’effet s’est un peu éventé. Je préfère les approche d’un Kyoshi Kurosawa concernant les films de fantômes, ou encore l’atmosphère fantastique et malsaine d’un Audition, sorti une année après Ring. Mais il reste un film très efficace et original dans son désir de créer du fantastique à travers des objets matériels comme une pauvre VHS mais aussi des photos argentiques. Les effets sont parfois appuyés, Nakata usant facilement du jumpscare comme lors de ces moments où l’on découvre des visages de victimes déformés par la terreur. Ces découvertes s’accompagnent alors d’effets sonores concoctés par Kenji Kawai particulièrement efficaces, marquants, et il est difficile de ne pas poursuivre le visionnage sans être hanté par ces visages. On se pose fatalement la question: qu’ont-ils vu? question suscitant à la fois une intense curiosité et une crainte délicieuse d’assister soi-même à la cause de leur effroi.

Sadako, vingt ans après (5)

La position dès lors devient un peu inconfortable. Non que Ring soit une sorte de train fantôme émotionnel. Mais c’est un film qui, avec la mise en scène relativement sage de Nakata et surtout l’ambiance sonore bruitiste, avec des sonorités métalliques désagréables, de Kenji Kawai, place le spectateur dans une ambiance de malaise qui lui fait suivre avec beaucoup d’intérêt la progression de la journaliste dans son enquête, avec, au bout d’une demi-heure, ce passage:

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On ne va pas trop déflorer l’instant avec une flopée de gif animés. Il s’agit du contenu de la fameuse contenu de la VHS. Contenu expérimental et très court puisqu’elle ne dure que trente secondes à peine. Mais à la fin de ces secondes, on est un peu comme Reiko :

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Scotché, fasciné et un brin effrayé, on se demande «mais qu’est-ce que je viens de regarder là?». Un peu plus loin dans le film, on aura droit à un flashback retraçant brièvement une partie de l’enfance de Sadako et là aussi, les images bruitées dans un noir et blanc très contrasté ne seront pas susciter le malaise. Comme empoisonné lui aussi par les images, le spectateur est alors mûr pour suivre Maki jusqu’au bout de sa quête pour se délivrer de sa malédiction avec, au bout de la piste, la fameuse scène qui contribuera à faire entrer Sadako dans le panthéon des méchants maléfiques, aux côtés de Freddy Krueger ou de Jason. Pas mal pour un jeune réalisateur qui entamait alors sa troisième année de carrière.

La suite pour Nakata on la connait. Un autre excellent film fantastique (Dark Water) suivi de films plus ou moins mainstream oscillant entre le mauvais et le correct, comme ce fut le cas récemment avec son honorable participation au projet Roman p*rno Reboot (son dernier film, Stolen Identity, semble être en revanche raté). De quoi regretter l’époque où Nakata se contentait d’un budget limité mais de quoi donner aussi envie d’explorer les réalisations pré-Ring, notamment ce Joyu-rei, réalisé deux ans plus tôt.

  • White Lily (Hideo Nakata - 2016)

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